Le Deal du moment :
ETB Pokémon Fable Nébuleuse : où ...
Voir le deal

Partagez
 

 « Mother I'd Like to Fuck. »

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
AuteurMessage

Robert Reignoux
Robert Reignoux

MESSAGE : 22

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyDim 30 Juin - 13:36


« Mother I'd Like to Fuck. »

AVEC NATHALIE TUREAU.


Le pied pour frapper dans un buisson insolemment penché sur le trottoir, Bobby attrapa le poignet de Camille, un grognement pour s'écouler de ses lèvres. « Rappelle-moi que je suis obligé, tu veux ? » La jeune fille lui sourit avec une grande tendresse, et vint se serrer contre lui. Elle défit le premier bouton de sa chemise, avant de renoncer. « Ce ne sera pas long, dit-elle. Ça n'arrive que quelques fois... » Camille dégaina sa moue habituelle, celle de la petite fille contre laquelle personne ne pouvait jamais rien. Ni Bobby ni sa mère, au demeurant. Et c'était cette même arme qu'elle avait retournée contre les deux afin de les convier au même dîner. Encore une fois. Bobby aurait dû y être habitué, pourtant, ce n'était pas la première fois. Mais chaque entrevue avec le Madame Nathalie Tureau ne lui rappelait qu'une seule et unique chose : elle avait nécessairement eu besoin de plusieurs vies pour devenir aussi chiante à mieux s'amuser d'une main coincée dans une porte. S'il tut ses propres réflexions, Camille n'eut qu'à le regarder pour devenir, si bien qu'elle le frappa à l'épaule : « Arrête de penser du mal de ma mère ! » Il rit pour se défaire de son propre sérieux affligé. « Je ne vois pas de quoi tu parles. » « Tu vois très bien ce dont je parle, rétorqua-t-elle en l'entraînant à sa suite. Et dépêche-toi un peu : on va être en retard. »

La ponctualité fût leur sujet de conversation tout du long du restant de trajet. Enfin, ils arrivèrent face à un gigantesque portail noir qui, bien qu'en plein cœur du Marais, ne dissimulait pas une vulgaire cour intérieure encastrée entre deux bâtiments de sale béton. Au contraire. C'était tout un joli jardin, fleuri, coincé au beau milieu d'un urbanisme. La maison qui s'en dégageait, tout au fond, avait tout du joli pavillon résidentiel : bref, une perle champêtre en plein centre de la ville. Pour autant, cela ne résonnait que d'un seul son entre les tempes de Bobby : cette salope de prof avait trop d'thune pour l'peu d'jours travaillés à l'année.
Comme de coutume, Camille le précéda. Elle n'avait obtenu que la permission de venir le chercher à l'arrêt de bus, quelques trois cent mètres en contre-bas de la rue. Un véritable laisser-passer vers la liberté. « Détends-toi, lui conseilla doucement Camille en lui baisant la joue. » « Je suis détendu, là. » Faux. Erreur. Mensonge. Et sa délicate petite-amie rit à mi-voix, comme si une trop grande joie avait pu être prohibée dans un pareil endroit. « Elle est comme les chiens, c'est ça ? rit la voix de Bobby en retour. Quand elle sent la peur, elle attaque ?... » Il se fit écraser les orteils par la fille tandis que la mère basculait la porte d'entrée pour les accueillir. C'est parti, mon brave Bobby, bienvenu dans l'antichambre du Diable, rrrr. « Salut, maman, se dégagea la voix détachée de Camille. » Elle passa aussitôt le seuil en direction de la cuisine, abandonnant son triste petit-ami à son sort. « Bonsoir, Madame Tureau. » Entre ses lèvres, bien à lui, et malgré son grand sérieux, cela valait carrément un bon bonsoir, sale conne.
Revenir en haut Aller en bas

Nathalie Tureau
Nathalie Tureau

MESSAGE : 14

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyDim 30 Juin - 15:17


Il y avait des situations qui mettaient Nathalie Tureau particulièrement mal-à-l'aise. La foule en sudation dans le métro. Les photos de son enfance miraculeusement retrouvées au fond d'un tiroir en plein dîner de famille. Les débats politiques de couloir avec ses collègues gauchistes. Ou bien encore l'idée de devoir abriter pour un soir la carcasse dégingandée de Bobby, le petit-ami de sa fille, sous son propre toit. « Bonsoir, Madame Tureau. » fit-il alors que Camille, cette perfide, disparaissait déjà. Fidèle à ses bonnes manières, Nathalie lui rendit la politesse, dans un sourire pincé. Et s'écartant pour le laisser entrer, elle évaluait déjà le temps qui la séparait de son départ, telle la condamnée sans sursis. « J'ai préparé une salade de quinoa à l'ananas et des galettes d'avoine aux courgettes. » crut-elle bon de préciser pour briser le silence, une fois dans la cuisine. Depuis le bar, l'oeillade amusée que Camille adressa à l'importun, resté en retrait ne lui échappa pas. Dieu qu'elle haïssait ce nouveau genre, produit de la fac et de cet imbécile. L'ironie facile de la jeunesse, ces petites provocations politiques faciles à table, cette légereté dans le comportement... La complicité avec un autre. C'était plus qu'elle ne pouvait supporter. Camille adorait le quinoa. Et qu'il le veuille ou non, Bobby allait en bouffer.

« Avec Bobby on a décidé de participer à un chantier bénévole le mois prochain. » déclara Camille entre deux bouchées de nourriture bio à trois euros le gramme. Le premier réflexe de Nathalie, qui avait à peine levé le nez de son assiette jusque là, fut d'interroger silencieusement l'autre en bout de table. Insondable. « C'est du côté de la frontière espagnole. On va.. Heu... Rénover un pont c'est ça ? » Elle le vit acquiescer mollement, comme peu concerné par la conversation. « Le mois prochain... Tu as des examens Camille. » fit-elle le plus posément possible. « Je sais, merci. » répliqua la gamine, arrachant un claquement de langue agacé à sa génitrice. « C'est une semaine avant. Relax. » Relax ? Sérieusement ? « Donc le mois prochain, en lieu et place de tes révisions pour des examens qui détermineront en partie ta future qualité de vie et ton épanouissement personnel, tu vas... retaper un pont en Espagne avec Bobby. » Et de se resservir un verre de Chardonnay.
Revenir en haut Aller en bas

Robert Reignoux
Robert Reignoux

MESSAGE : 22

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyDim 30 Juin - 16:35


J'ai préparé une salade de quinoa à l'ananas et des galettes d'avoine aux courgettes, marmonna Bobby entre ses tempes, c'est très bon pour la digestion quand on aime chier des graines, gniagniagnia. Et, de façade, il afficha un sourire bien trop arqué pour paraître naturel. En vérité, il avait eu la crainte d'avoir pensé à haute voix, et d'avoir abandonné les quelques mots qui lui auraient valu le sermon du millénaire. Mieux encore que Churchill balançant à Hitler que non, vraiment, mec, gazer les juifs, c'est pas bien du tout. Pire, surtout. Mais puisqu'elle les invita à passer à table sans avoir jamais sourcillé, Bobby se renfrogna dans sa victoire silencieuse. Vieille réac' de mes deux, allons bouffer des céréales.

Le dîner avait tous les espoirs de se dérouler dans un silence, certes gêné mais, le plus admirable du monde. Pour autant, c'était un souhait, tacite, que Camille préférait systématiquement enrayer, comme une forme de savante nuisance pour les deux autres. Car c'était alors tout un supplice à lire sur les visages de Nathalie et de Bobby, qui ne se persécutaient jamais du regard. Bien au contraire. « Avec Bobby on a décidé de participer à un chantier bénévole le mois prochain. » Bim. Un, zéro, la vieille. Néanmoins, le jeune homme se racla la gorge et s'empressa d'avaler une bouchée, comme pour signifier son indisponibilité quant à cette conversation. Il n'avait aucunement l'intention d'y participer, pas même pas un vague acquiescement du menton. Camille ne cherchait jamais son soutien, puisqu'elle arborait cet air de parler météorologie, tout en sachant que leurs projections pour l'avenir avaient toutes les raisons de contrarier la marâtre. De l'adolescence en billets de cent. « Le mois prochain... Tu as des examens Camille. » « C'est une semaine avant. Relax. » La formule arracha un sourire à Bobby, qui s'empressa de le dissimuler derrière son verre d'eau. C'était tout un spectacle de voir la fille s'opposer à la mère, de voir encore la mère se débattre avec ses certitudes sur l'éducation et la cruelle réalité de l'existence. Il n'avait pas besoin de parler. Seulement à regarder, déguster cette discussion ô combien plus savoureuse que ce repas pour végétariens en carence. « Donc le mois prochain, en lieu et place de tes révisions pour des examens qui détermineront en partie ta future qualité de vie et ton épanouissement personnel, tu vas... retaper un pont en Espagne avec Bobby. » Il y eut un long silence, que Camille respecta certainement parce qu'il n'y avait aucune raison d'entamer davantage la patience de sa mère. Ce fût donc, enfin, le moment de gloire moqueuse de Bobby : « Si je peux me permettre, se permit-il, la rénovation de ce pont est très importante pour le tourisme, là-bas. L'association encourage justement les jeunes à s'épanouir en pensant d'abord aux autres avant eux-mêmes. » Il affronta sereinement le regard de Nathalie. Camille l'approuvait depuis son propre coin de table :  « C'est vrai. Et puis j'aurai tout le temps de réviser. Et même si je manquais mes examens, il y a toujours les rattrapages ! » Excès d'enthousiasme. Les deux jeunes gens avisèrent Nathalie d'un même regard : rattrapage, ah que c'était un mot sale que celui-là !
Revenir en haut Aller en bas

Nathalie Tureau
Nathalie Tureau

MESSAGE : 14

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyDim 30 Juin - 17:28


Si Nathalie passa volontiers sur l'entêtement de sa fille, forte de la conscience rassurante des lois imposées dans le foyer Tureau, prohibant toute sortie du territoire en compagnie d'un quelconque mâle, la remarque pernicieuse de celui qui aurait n'aurait même pas dû manger à leur table lui resta en travers de la gorge. Pourtant, infiniment tranquille en dépit de tout, elle posa sa fourchette pour joindre ses mains sous le menton.   « L'épanouissement des jeunes... Admirable. Les jeunes de douze à trente-cinq ans je suppose ? » Elle le tint en joug un moment, juste le temps pour Camille d'énoncer une nouvelle aberration. « C'est vrai. Et puis j'aurai tout le temps de réviser. Et même si je manquais mes examens, il y a toujours les rattrapages ! » Il lui avait fait subir un lavage de cerveau, Nathalie ne voyait que ça. A force de doctrines hippies issues d'une époque que ce morveux n'avait même pas connue. « Aide-moi à débarrasser tu veux. » « Mais j'ai pas fini mon ass... » « Maintenant. » siffla t-elle, de sorte que Camille préférât éviter l'esclandre.

« Franchement Camille, je ne comprends pas. » souffla t-elle à demi-mots, protégée par un semblant de cloison. « Il suffit d'un... joli minois pour que tu oublies tous tes projets, tous tes rêves ? » « Il est beau, hein ? » sourit la jeune fille en laissant glisser les couverts dans l'évier. « Seigneur... » Malgré tout l'amour et le respect qu'elle nourrissait pour la chair de sa chair, elle ne voyait plus en face d'elle qu'une petite écervelée qu'il importait de secouer à tout prix. « Je sais bien qu'à ton âge il est difficile de faire la part des choses mais... » « ...mais tu le regretteras plus tard, tu verras quand tu seras grande ! » singea t-elle. Mais face au visage définitivement fermé de sa mère, elle se reprit plus doucement. « Tu dois me faire confiance, maman, je n'ai plus dix ans. Et sortir avec Bobby ne m'empêchera pas de réussir mes études. Au contraire, tu sais, il m'encourage vachement. » « A sauver les bébés phoques ? » « Qu'est-ce que tu as contre les bébés phoques ? » « Mais ça n'est pas la question ! » explosa sa mère. Dans un sursaut de bienséance, elle jeta presque aussitôt une oeillade du côté de la salle à manger, déserte. « Il est à la fois trop vieux pour toi et totalement immature. Il n'a ni vrai boulot, ni projet à long terme. A quarante ans, il vivra probablement encore aux crochets de la société. Et tu te vois épouser un type pareil ? » « Oui. » répondit l'enfant comme un ultime affront. « Tu n'iras pas à ce chantier débile. Et surtout pas avec lui. Est-ce que c'est clair ? » « Très. » Et saisissant la boite de pâtisseries que sa mère lui tendait en tremblant, rien qu'un peu, elle lui fit grâce d'une nouvelle réplique assassine.

A nouveau seule, Nathalie se remémora le chapitre douze de « Vivre en bonne intelligence avec son ado. » mais n'arriva pas à se souvenir d'un quelconque passage conseillant de traiter sa fille de dix-huit ans comme une enfant entrant au primaire.
Revenir en haut Aller en bas

Robert Reignoux
Robert Reignoux

MESSAGE : 22

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyDim 30 Juin - 21:40


Selon Bobby, tout – et surtout rien – était prétexte aux esclandres mesurées de Nathalie Tureau. Madame le professeur avait une sainte horreur des sujets qui échappaient à son empire, mais les éclats de voix la révulsaient plus encore. Il ne fallait certainement pas se disputer à table. Non, bien sûr, mieux vaut lancer de petites piques mesquines comme une collégienne qui griffonne ses méchancetés sur un papier filé à sa voisine. « L'épanouissement des jeunes... Admirable. Les jeunes de douze à trente-cinq ans je suppose ? » « Vingt-huit. » Bobby soutint son regard sans jamais sourciller. Elle pouvait bien le persécuter de son attention, il se trouvait incapable de se départir de son flegme victorieux. Et Camille fût, de toute façon, trop prompte à libérer son outrage pour les laisser s'affronter plus longtemps. Et là, c'est le drame. « Aide-moi à débarrasser tu veux. » Resté en retrait, tranquillement sur sa chaise, il se gorgea de cette nouvelle victoire sur l'affreuse belle mère de Cendrillon. Il ne l'emporterait pas au Paradis, devait-elle se dire. Dans ton cul, belle-maman ! rétorquait-il.

Les Tureau, Mère et Fille, éclipsées, l'ennui frappa Bobby. Entrevoir la marâtre suffisait à lui exaspérer les nerfs, si bien qu'il s'arracha à son siège, balayant la pièce du regard. A cette heure, il avait presque l'air réjoui d'un enfant sur le point de chercher quelque forfait à commettre. « J'vais aux toilettes, hein ?! » Aucune ne l'entendit. Fort bien. Il grimpa donc à l'étage, libérer ce trop-plein de vin valant une petite fortune, mon cher ami, uhuh. « Quand on pense au très bon rouge foutu dans une bouteille en plastique et qui coûte pas plus d'un euro, p'tain... » Échappé à l'espace salle-de-bain, il se trouva dans un couloir dont l'intérêt lui parut nouveau. Pour autant qu'il avait pu précédemment en juger, cette maison était d'un ennui incroyable. Pour autant, de malveillantes intentions devaient être venues le posséder quand il poussa la porte d'une chambre, qu'il savait n'être pas celle de Camille. Abracadabra, Ikéa, Chambre Modèle Tujnürik. « Sérieux, Nathalie... Cette couleur, c'est plutôt taupe écrasée sur l'A4 ou corail rouillé, hm, hm ? tenta-t-il l'imitation. » Du pareil au même, jugea-t-il en s'affalant sur le lit.

Son exploration ne présenta pas le moindre intérêt, d'autant que le temps lui était compté. Dans peu de temps, Madame Tureau allait... Bobby arrêta net le fil de ses pensées. Un ordinateur portable. Fermé. Il releva aussitôt le capot, et appuya sur la première touche à sa portée. L'écran s'illumina aussitôt, le fond d'écran et le bureau offerts tout à loisir. « Imprudente, ricana-t-il d'un souffle. » Il se mit à cliquer un peu partout, allant de dossier en historique de navigation. « Bobby ! Le dessert ! l'appela la voix de Camille en contrebas de l'escalier. » Il sursauta fébrilement. « J'arrive, trouva-t-il le temps de hacher, les yeux stupéfaits par sa découverte. » Le souffle court, il claqua le capot de l'ordinateur, referma vaguement la porte derrière lui et se rassit à table. Ses traits semblaient tendus. Inattentifs. Étrangement bouleversés. Nathalie Tureau, ma chère belle-maman, laissez-moi vous avouer que vous êtes une putain de belle salope.


Dernière édition par Robert Reignoux le Dim 30 Juin - 22:59, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas

Nathalie Tureau
Nathalie Tureau

MESSAGE : 14

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyDim 30 Juin - 22:14


Nathalie et Camille Tureau demeurèrent un moment en tête-à-tête, ambiance « le petit chat est mort ». La première voulut bien tenter un mot d'excuse mais son orgueil d'autorité parentale le lui défendit. « Qu'est-ce qu'il fabrique ?... » soupira t-elle, plus pour la forme que par véritable agacement. En guise de réponse, Camille fit râcler sa chaise sur le carrelage pour appeler son cher et tendre.

Elle attendit à peine qu'il pose ses fesses sur sa chaise pour se ruer sur son éclair au café, véritable remède à une soirée merdique, bien que constituant une entorse impardonnable à son régime strict d'obsédée de la ligne. « Est-ce que ça va ? » entendit-elle murmurer, daignant enfin lever les yeux de son assiette. Depuis son retour d'expédition aux toilettes, le dénommé Bobby affichait effectivement une mine pas possible, entre l'hébétement le plus total et l'envie de gerber, Nathalie n'aurait su trancher. « Tu ne te sens pas bien ? » demanda t-elle finalement, sans la moindre compassion dans la voix. Tu veux te tirer ? Pour toujours ? Elle battit cependant en retraite à l'instant où Camille la fusillait des yeux, sa main délicate trouvant soudain celle de Bobby. Ce fut déjà trop d'intimité pour Nathalie qui hésita même à s'éclipser, avant de prendre conscience de son quart d'éclair, toujours à l'agonie dans la faïence. « Tu peux rester dormir à la maison, si tu te sens mal. » Pour un peu, Nathalie en aurait rendu son dessert pourtant ô combien mérité. Camille avait sept ans et commandait « la paix dans le monde » au père Noël.

Il n'y avait qu'à aviser son sourire sarcastique. Le plus débile des débiles congénitaux aurait compris qu'une telle idée était à mettre dans le même sac que le mur de Berlin ou l'épilation des filles prépubères. « Ou te reposer un peu avant de rentrer. » grinça la jeune fille. La tête dans le Chardonnay, sa mère acquiesça bien plus volontiers.
Revenir en haut Aller en bas

Robert Reignoux
Robert Reignoux

MESSAGE : 22

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyDim 30 Juin - 22:58


Sa stupeur lui provoqua une absence nappée d'images et de lettres, qui s'étalèrent devant ses yeux avec une rare violence. Bien que l'évidence lui fût apparue sans négligence, sa lucidité peinait à émerger. Putain. Ce n'était pas seulement que Nathalie ne fût pas celle qu'il pensait... C'était cette nouvelle certitude qu'aucun d'entre eux – trois – ne savait véritablement qui était les deux autres. Et, pour le moment, il était d'ailleurs le seul à en avoir connaissance. Cette sorte de puissance étrange se déversa comme d'un seul homme dans ses veines. « Est-ce que ça va ? » Camille s'était penchée sur lui, certainement dans l'espoir de lui tirer ses états d'âme. Elle parvint quand même à le ramener à l'heure de cet étrange dîner. « Hm... oui. Je. » Bobby balaya la salle à manger des yeux, avant que son regard ne consentit à en venir jusqu'à Nathalie. « Tu ne te sens pas bien ? » « Si, lâcha-t-il précipitamment. » Il déglutit lentement. « Si, répéta-t-il d'un nouvel aplomb. Je vais bien. » Camille lui prenait déjà la main qu'il ne pouvait plus se dégager de son attention toute portée sur son incroyable génitrice.  « Tu peux rester dormir à la maison, si tu te sens mal, lui proposa doucement la jeune fille. » Une nouvelle erreur de protocole qui n'arracha aucune réaction au concerné. « Ou te reposer un peu avant de rentrer,  corrigea-t-elle après avoir consulté l'allure défaite de sa mère. » Un léger rictus, presque imperceptible, naquit sur les lèvres de Bobby tandis que son esprit s'éclairait d'une idée allant bien au-delà.

« En vérité, détacha-t-il chaque syllabe, oui, j'aimerais bien rester. » Camille le scrutait avec l'intérêt d'un garde-malade pour son patient souffrant, tandis que Bobby ne détachait plus les yeux de Nathalie. « Je ne sais pas... ça doit être le quinoa qui n'est pas bien passé. » Il fit l'imagé tracé de son œsophage tout du long de son torse. Comme il imaginait déjà toutes les protestations de l'hôtesse de la curieuse maisonnée, il serra la main de Camille entre ses doigts tandis qu'il reprenait, non sans appuyer son propos d'un ton particulièrement affecté : « Si ça ne vous dérange pas, bien sûr. Je partirais tôt, demain matin. De toute façon, j'ai entendu dire qu'un certain Braseul avait fait son vernissage très récemment, à deux rues d'ici. La galeriste qui l'expose avait l'air passionné par son œuvre. » Camille ne comprenait rien, mais son inquiétude pour l'homme de ses rêves allait bien au-delà des mots qu'il tenait. En vérité, elle devait prendre ce discours pour une sorte d'égarement dû à ses maux d'estomac. Mais ce n'était en rien l'attention de la fille que Bobby souhaitait capter à cette heure. Il eut un regard pour Camille, mais il en revenait toujours à Nathalie, qu'il semblait percevoir avec une nouvelle clairvoyance ô combien perçante. « Je ne voudrais pas vous déranger, Madame Tureau, conclut-il lentement. J'imagine que vous êtes une femme très occupée, et qu'il n'y a pas que l'université qui vous prend tout votre temps. » Là, quelque part, sur son visage stoïque, se dessina un nouveau sourire. Il était difficilement dessiné, à peine éclos, mais bel et bien présent. Échec et mat.
Revenir en haut Aller en bas

Nathalie Tureau
Nathalie Tureau

MESSAGE : 14

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyDim 30 Juin - 23:34


« En vérité, oui, j'aimerais bien rester. » Fantastique. Si le type lui sortait par les yeux, elle avait au moins parié sur son semblant de bon sens, sur son instinct de survie même... à tort. Il jouait divinement la comédie du malade imaginaire, dont au moins l'une des deux Tureau n'était pas dupe. Ce petit enfoiré voulait juste avoir la satisfaction de transgresser l'ultime interdit. Et en même temps que les arômes fruités de l'alcool, elle sentit l'âpre goût de la défaite. C'était assez de conflit mère-fille pour un soir. Sans accorder un regard à qui que ce soit, elle capitula sobrement. « La chambre d'amis est en bas. Fais comme chez toi. » Dans son champs de vision latéral, Camille osa bien un ersatz de protestation avant de se souvenir combien il devait déjà en couter à sa nonne de mère. La remarque pernicieuse sur ses prétendues failles culinaires l'effleurèrent à peine, tant elle en venait à espérer qu'il aille s'enfermer dans la dite chambre pour n'en plus jamais ressortir.

Mais la soirée ne manquant visiblement pas de ressources dans le sordide, Bobby se montra tout à coup foutrement loquace, étonnant même sa petite-amie, plus habituée à un silence de mort en présence du dragon. « Si ça ne vous dérange pas, bien sûr. Je partirais tôt, demain matin. De toute façon, j'ai entendu dire qu'un certain Braseul avait fait son vernissage très récemment, à deux rues d'ici. La galeriste qui l'expose avait l'air passionné par son œuvre. » Si la biologie avait pu permettre une telle aberration, Nathalie se serait littéralement liquéfiée sur place. D'abord, les mots s'entrechoquèrent dans sa tête, et puis ils prirent douloureusement leur sens, comme si l'autre s'était personnellement chargé de les lui enfoncer dans le crâne. Petit fils de pute...

Son instinct de mère ne l'avait pas trompée. En plus d'être un loser notoire, Reignoux était une fouine malintentionnée. « Je ne voudrais pas vous déranger, Madame Tureau. J'imagine que vous êtes une femme très occupée, et qu'il n'y a pas que l'université qui vous prend tout votre temps. » Et Camille de le couvrir de son sourire attendri alors qu'il s'apprêtait probablement à extorquer de l'argent à sa mère. Pourquoi diable n'avait-elle pas été plus prudente ? Pourquoi n'avoir pas pensé au pire en présence d'un type pareil ? Quoique Camille puisse penser, Nathalie n'était pas si sévère. Pas assez visiblement. Leur échange silencieux finit par ne plus échapper à la jeune Tureau, qui, si elle pressentit le malaise, était à mille lieues d'en imaginer la source. Tout ce qu'elle voyait, c'était le verre dangereusement vide entre les mains de sa mère, et le lâcher prise qu'il risquerait de lui conférer. « Peut-être qu'on ferait mieux d'aller se coucher, si... Si tout le monde a des obligations. » « Tu as meilleure mine je trouve. » parvint-elle enfin à articuler, sans accorder une once d'attention à l'intervention de sa fille. « Peut-être que le séjour prolongé sera superflu finalement. » Et ça, c'était bien pour ne pas avoir à dire : Dégage immédiatement connard, ou c'est les flics qui te souhaiteront bonne nuit.
Revenir en haut Aller en bas

Robert Reignoux
Robert Reignoux

MESSAGE : 22

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyLun 1 Juil - 0:15


Contrairement aux apparences, Bobby n'était pas malintentionné. Il trouvait simplement la situation... totalement désopilante. La comédie du siècle. La farce du millénaire. Le vaudeville, même ! L'occasion était trop belle, les circonstances trop optimistes ! Il le savait fort bien : il n'y allait à voir, tout du long de son existence, aucune situation capable de s'approcher de celle de soir. S'il ne savourait pas, jusqu'à la dernière goutte, de cet humour presque ironique, il n'allait plus jamais connaître de plaisir comparable. Et puisqu'il s'agissait de rire de Madame Nathalie Tureau, le spectacle n'en gagnait qu'un peu mieux en intérêt. C'était spectaculaire, spectaculairement désopilant !

Car si l'affreuse marâtre s'était rendue sans combattre à son offensante demande, la suite de ce théâtre fût bien moins pour la réjouir. Le voile passé devant ses yeux. La pâleur de son teint, bien plus diaphane encore que de coutume. La gêne. Puis l'exaspération. Et enfin la colère. Elle était littéralement bouleversée sous ses yeux, et Bobby, lui, exultait au plus calmement qu'il le pouvait. Cet échange n'avait d'ailleurs que plus belle amertume qu'elle se déroulait en présence d'une tierce personne que Nathalie n'aurait certainement pas souhaité instruire de la réalité. En vérité, elle était encore loin d'imaginer une réalité qu'il avait déjà bien compris. Oui, il avait mis son nez dans des affaires qui ne le regardaient pas... mais non, ce n'était pas ainsi qu'il savait tout ce qu'il savait. « Peut-être qu'on ferait mieux d'aller se coucher, si... Si tout le monde a des obligations, tenta finalement Camille, lorsque le silence commença d'être insupportable. » « Tu as meilleure mine, je trouve, objecta plutôt sa mère. Peut-être que le séjour prolongé sera superflu finalement. » Oh non, je ne vais pas m'en aller tout de suite. Pour jouer son drame, Bobby déglutit lentement. « Vous avez sûrement raison, Madame Tureau, dit-il en se levant. Je vous aide pour la vaisselle, puis je m'en vais. »  Il tendit la main pour son assiette, tandis que Camille tentait un regard pour sa mère. Ce n'était pas qu'il jouait bien la comédie, mais plutôt que la scène tenait d'un surréalisme qui devait diablement dépasser l'enfant. « Il n'est que... bientôt vingt-trois heures, signifia-t-il en regardant sa montre. » Il embrassa le front de Camille dans l'unique but de pouvoir dégainer son sourire à l'adresse de Nathalie. Vingt-trois heures, l'heure du crime, Bloodymary. Mais ce n'était pas tout. Pendant qu'il ramassait les couverts, Bobby cherchait. Il cherchait ce qui rendrait sa démarche bien plus explicite. Ce qui ferait réaliser à Nathalie qui il était vraiment : « Camille m'a dit, lâcha-t-il sur le ton de la conversation, que votre film préféré était Pretty Woman ? » « Ce n'est pas moi qui t'ai dit ça, répondit doucement Camille en ramassant sa part de vaisselle. » « Ah non ?  fit-il d'une innocence qui n'en avait que le ton. » « Maman déteste les films comme Pretty Woman... »   « Ah oui ? conclut-il d'un même ton. »
Revenir en haut Aller en bas

Nathalie Tureau
Nathalie Tureau

MESSAGE : 14

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyLun 1 Juil - 10:59


« Vous avez sûrement raison, Madame Tureau. Je vous aide pour la vaisselle, puis je m'en vais. » Elle l'aurait tué de prendre son pied de la sorte, de violer une intimité qui le dépassait de très loin, et de s'en amuser comme un gosse de surcroit. « Il n'est que... bientôt vingt-trois heures. » Si ce crétin avait vraisemblablement lâché l'information sans savoir, Nathalie ne put s'empêcher de tressaillir. Elle n'osait même plus ouvrir la bouche, ou lui accorder un regard, de peur de céder à ses pulsions de meurtre en présence de Camille. Pourtant elle le devinait, sourire, savourer, bander en somme. Il suffisait d'endurer ce supplice, encore une poignée de minutes. Il avait dit qu'il se tirerait. Il n'avait aucune raison de mentir. Accrochée à son espoir sécurisant comme une moule à son rocher, Nathalie vit à peine la suite arriver, comme un train à grande vitesse en plein dans la gueule. « Camille m'a dit que votre film préféré était Pretty Woman ? »

Cette fois, ce fut autre chose. L'incompréhension la plus totale. Au point même qu'elle en vint à vouloir capter son regard à tout prix, comme s'il allait lui répondre. Mais il se bornait au naturel le plus désarmant, affairé une seconde, poliment intéressé ensuite... « Oui. Son film préféré c'est... Je n'arrive jamais à me souvenir du titre. Un vieux classique avec ce type, là... Robert Mitchum. » Elle tenta bien d'instaurer une forme d'interaction avec sa mère, mais cette dernière se souvenait à peine de son prénom pour l'heure. « Okay... » souffla t-elle imperceptiblement. « Camille ? Dans le cellier, il y a un Bourgogne quatre-vingt-trois. Tu veux bien aller me le chercher ?... S'il te plait. » Ce n'était probablement pas une bonne idée. De mémoire, Camille n'avait jamais vu sa mère abuser de la picole sans qu'il y eut un anniversaire de divorce ou une amie remariée. Elle interrogea silencieusement Bobby, et quand elle fut à peu près certaine qu'il pourrait survivre deux minutes sans les brassards, elle s'éclipsa doucement.

« Ca, ça n'est pas sur mon ordinateur. » déclara t-elle brutalement, la plus grande des réprobations pour le délit en sourdine. « Et j'ai du mal à croire que tu ais également eu le temps de passer mon dressing au crible pour y trouver mon disque dur. D'autant que cinq minutes, c'est un peu court pour trouver un mot de passe et se taper un an d'historique de conversation en diagonale. » Appuyée contre le plan de travail, elle ne cessait de sonder son amusement tranquille, jamais partagé. « Mais aussi invraisemblable que cela puisse paraitre... Il n'y a pas d'autre explication. Tu es une sorte de... petit génie, hm ? » Sa raison l'exhorta au calme, mais Nathalie n'y pouvait rien, à l'intérieur, ça s'emballait dangereusement. Comme quand on sait, mais qu'on ne veut pas entendre, parce que ça devient vrai.
Revenir en haut Aller en bas

Robert Reignoux
Robert Reignoux

MESSAGE : 22

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyLun 1 Juil - 17:25


Bobby ne se le figurait pas encore, mais la situation était sur le point de lui imploser au visage. Il ne mesurait pas son adversaire à sa juste valeur. Il méprisait même quelque peu le danger. Le regard de Nathalie n'était pourtant pas pour tromper sur ses sombres intentions... mais il jouait si bien l'insouciant, tout prêt à déguster son plaisir, qu'il ne voyait encore rien du grand drame qui se préparait, en coulisses. Il préférait encore cette allure qu'elle avait : celle de la femme qui, non contente d'être défaite, l'était toujours davantage à mesure des secondes qui filaient. Et tout était sur le point de la vaincre. Aucune chance que je lâche l'affaire. Il souriait perpétuellement, de ses dents mordillant quelques fois sa lèvre inférieure. Et pour autant qu'il pensait maîtriser sa propre condition, Nathalie eut tôt fait de prononcer, en même temps que sa reddition, le nouvel échelon de cette tragi-comédie. Allez, pour le bonheur de Molière et des autres !

« Ça, ça n'est pas sur mon ordinateur, lâcha-t-elle quand Camille se fût éclipsée de la pièce. » « Vraiment ? feigna-t-il sans y confondre la moindre conviction. » Dans son corps de presque trentenaire, frémissait le tumulte d'un adolescent téméraire. Je n'ai pas besoin de ton ordinateur... puisque j'ai le mien. Tout à sa joie, il la laissa d'abord parler, n'escomptant qu'un peu mieux exulter tout à l'heure. « C'est un peu court, disait Nathalie - toute à sa rage quant à elle, pour trouver un mot de passe et se taper un an d'historique de conversation en diagonale. » « Parce que tu gardes les historiques, en plus ? glapit-il avec satisfaction et moquerie. » Il parut s'en trouver ravi. Non. Même davantage. Son bonheur ne connaissait plus aucune frontière. Il la laissa pourtant marmonner, râler et condamner, en séance, ce dialogue improbable. Mais lui n'en avait pas fini. Non, ce n'en était même qu'au commencement : « Quoi ? ouvrit-il les bras. Tu n'es pas contente de me voir ? » Il gloussa en même temps qu'il se désignait tout entier. « J'y crois pas ! dit-il enfin, sans plus feindre sa surprise. C'est toi... » Il rit encore, quelque peu hystérique à présent. « J'y crois pas que ce soit toi ! » Il ne baissait plus le ton et, à le voir, l'on eut cru qu'il venait de découvrir le dessin précis, et plaisant, de sa meilleure amie au monde – ce qui, pour sa défense, était tout à la fois très proche et très lointain de la réalité. « Tu te rends compte ?... » Bobby les désigna tous deux à plusieurs reprises, de gestes frénétiques. « Toi. Moi. En vrai ! Putain, c'est pas croyable... Nathalie Tureau, putain... Nicolas voudra jamais me croire ! » Il rit encore, il ne faisait jamais que cela. En l'absence de Camille, il n'y avait aucune inhibition pour s'apposer sur son être. En vérité, même la présence de Camille ne le ralentirait plus... en tous les cas, plus très longtemps.
Revenir en haut Aller en bas

Nathalie Tureau
Nathalie Tureau

MESSAGE : 14

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyLun 1 Juil - 18:06


L'espoir, infime, tué dans l'oeuf. Robert. Son selfmademan était aussi le Bobby de Camille. Et il riait à gorge déployée, là, dans sa cuisine, alors qu'elle n'aspirait qu'à se fondre sous terre. « J'y crois pas que ce soit toi ! » « Je te rassure, moi non plus... » articula t-elle faiblement, les yeux vissés au carrelage. « Tu te rends compte ?... » « Est-ce que je me rends compte que le type avec qui j'entretiens une relation virtuelle est en fait le petit-ami de ma propre fille ? Est-ce que je me rends compte à quel point ma vie craint ? La réponse est non, mais ça ne devrait pas tarder. » fit-elle sèchement en daignant enfin supporter son hilarité les yeux dans les yeux. « Toi. Moi. En vrai ! Putain, c'est pas croyable... Nathalie Tureau, putain... Nicolas voudra jamais me croire ! » Puisque toutes les barrières semblaient avoir été franchies, le tutoiement et le foutage de gueule compris, la victime ne se priva pas pour agripper la chemise de son bourreau. « Je ne sais pas qui est cet abruti de Nicolas, mais si tu t'avises d'en parler à qui que ce soit... Je te jure que je t'arrache les couilles. » Pas certaine que le message fut passé, aux vues de son visage éternellement rieur, elle consentit cependant à relâcher son emprise.

Elle se mit alors à faire les cent pas dans l'espace exigu, en quête de l'impossible : une issue rationnelle, raisonnable. Mais l'affect venait toujours troubler ses tentatives intérieures. Elle se sentait humiliée. Honteuse. Mais sa réaction à lui était bien ce qui la troublait le plus. « Et puis pourquoi ça te fait autant marrer, hein ? Pourquoi est-ce que tu n'as pas l'air... » s'arrêta t-elle tout à coup. « Je ne sais pas... Déçu ? Ou même un peu perturbé ? » Parce qu'elle l'était, elle, perturbée. Si elle n'avait pas jugé l'acte aussi puéril, elle se serait probablement pincée pour s'assurer de la réalité de l'instant. Mais finalement, en rêver n'était-ce pas encore plus glauque ? Nathalie perdait la raison, s'engluait toute seule dans les suppositions les plus farfelues. Il n'y avait qu'une seule et unique certitude à laquelle s'accrocher à présent : Robert n'avait pas trente-cinq et il ne l'emmènerait jamais à New-York. Et ça n'avait rien de réconfortant.
Revenir en haut Aller en bas

Robert Reignoux
Robert Reignoux

MESSAGE : 22

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyLun 1 Juil - 20:05


Nathalie ne riait pas. Elle n'esquissait pas même l'ombre d'un sourire. D'une certaine façon, cela devait ajouter au comique de leur fortunée infortune – encore qu'il fallait, une nouvelle fois, se situer dans les tranchées de Bobby. Rien ne l'amusait dans cet étrange tumulte, cette reconnaissance fortuite, cette rencontre incroyablement ironique. S'il exultait, elle le rappelait toujours à l'ordre, d'un geste, d'un mot ou d'un regard. Et, en vérité, chacune des violences qu'elle employât contre lui ne fût pas pour calmer son amusement sans proportion. « Je ne sais pas qui est cet abruti de Nicolas,  siffla-t-elle, l'ayant saisi, mais si tu t'avises d'en parler à qui que ce soit... Je te jure que je t'arrache les couilles. » Bobby prit un instant, comme pour bien mesurer la portée de la menace. Il n'avait pas grand-chose à perdre, se disait-il et, de la même façon, il ne voulait en rien l'offenser davantage. Il ne voulait guère l'offenser en aucune manière. Si bien qu'il souffla en réponse : « Compris, Madame. » Pour une seconde à peine, il avait retrouvé de son sérieux. Pour une seconde à peine, son sourire avait disparu. Mais ce ne fût qu'un court repos, puisque chaque fois qu'elle reprenait de son allure, Bobby y retrouvait comme quelque chose de familier qu'il avait cru perdre pour toujours : et cela, ça n'allait pas disparaître. Loin de là.

Elle prit finalement le recul nécessaire à toutes les réflexions. Bobby ne nourrissait aucune envie de démêler cette situation. Selon lui, la solution venait même d'apparaître, dans le nébuleux de leurs secrets. Elle marqua le silence qu'il lui offrit sans même y songer. Elle arpentait déjà sa cuisine toute équipée, et lui la dévorait des yeux avec impatience. « Et puis pourquoi ça te fait autant marrer, hein ? chemina-t-elle. Pourquoi est-ce que tu n'as pas l'air... » Il s'apprêtait à hausser les épaules quand elle entreprit de compléter sa pensée : « Je ne sais pas... déçu ? Ou même un peu perturbé ? »  « Pourquoi est-ce que je serais déçu ? plaida-t-il avec empressement. Tu ne te rends pas compte que c'est parfait ! que nous allons... » Il n'eut pas le temps d'achever sa phrase que Camille laissait éclater les quelques tessons de sa voix lointaine : « Impossible de la trouver, Maman. Je... » Maintenant qu'elle revenait à la cuisine, elle allongea le regard depuis sa mère jusqu'à Bobby, puis réciproquement. « Est-ce que tout va bien ? » Si l'instant lui semblait étrange, c'est qu'il l'était bel et bien. « Oui,  déclara Bobby, qui dissimulait désormais son sourire derrière l'ultime assiette déposée dans le lave-vaisselle. Tout va bien. Ta mère était justement en train de me proposer de déguster cette bouteille de vin afin d'oublier nos anciens différends. » Il prit la bouteille de substitution des mains de la jeune femme, qu'il embrassa sur le front en la dépassant. « En fait,  dit-il depuis la salle à manger, on s'est rendus compte que nous avions beaucoup plus de choses en commun qu'on ne l'imaginait... » Il souriait encore quand il ouvrit la bouteille d'un seul geste.


Dernière édition par Robert Reignoux le Mar 2 Juil - 7:57, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas

Nathalie Tureau
Nathalie Tureau

MESSAGE : 14

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyLun 1 Juil - 20:42


« Tu ne te rends pas compte que c'est parfait ! que nous allons... » Le début de formulation seul suffit à lui faire hausser les yeux au ciel. Fort heureusement, Camille survint à point nommé pour couper court à toute nouvelle parole imprudente. « Est-ce que tout va bien ? » Elle le laissa se justifier, lui qui semblait si à l'aise avec la nouvelle donne. « En fait, on s'est rendus compte que nous avions beaucoup plus de choses en commun qu'on ne l'imaginait... » Camille se tourna, se retourna, jusqu'à s'en déboiter la nuque. « C'est vrai ? » articula t-elle à voix basse, masquant à peine ses espérances. Nathalie acquiesça vaguement. Inutile de compliquer la situation. « Merci... » souffla t-elle, timide, mais ravie, avant de le rejoindre.

Seigneur, n'en verrai-je donc jamais la fin, songea t-elle en se laissant retomber sur sa chaise, un verre fort heureusement plein pour lui tenir lieu de réconfort. « Alors ? » enchaina presque aussitôt la jeune fille sur un ton léger. « Vous vous êtes découverts des passions communes ? » « Tout à fait. Figure-toi qu'il donne bien le change, mais Bobby est passionné par l'économie de marché. Je me disais aussi... Tu étais si assidu en cours. » répondit-elle, le sarcasme suintant de tout son être. Puisqu'il semblait si enclin au jeu, et le bon-vin-qu'on-ne-sort-que-pour-les-grandes-occasions aidant... « Vraiment ? » grimaça sa fille, avant de laisser échapper un petit rire. Bobby ? Le type qui fustigeait les grandes entreprises, les patrons, la société de consommation, les riches et les moutons (pas forcément dans cet ordre), intéressé par les cours techniques et rébarbatifs de sa mère ? Il n'y avait pas de doute... S'il était capable de faire tant d'efforts pour plaire à sa mère, c'était bien la preuve qu'il était l'homme idéal.
Revenir en haut Aller en bas

Robert Reignoux
Robert Reignoux

MESSAGE : 22

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyMar 2 Juil - 9:33


Il fallait jouer le jeu. D'abord pour Nathalie, qui eut écumé sa meilleure syncope s'il avait osé révéler le début de la vérité. Ensuite pour le plaisir lui-même, pour ce goût, nouvellement découvert, celui de l'amusement passablement sordide. Quand le spectacle n'était plus seulement distrayant, mais également pervers. Bobby n'en éprouvait aucun trouble. Il se sentait, en vérité, parfaitement libéré. Oui, vraiment, la solution lui était définitivement apparue.

«  Figure-toi qu'il donne bien le change, lâcha la mère vindicative, mais Bobby est passionné par l'économie de marché. Je me disais aussi... Tu étais si assidu en cours. » C'est de bonne guerre. Mais c'est un peu amateur, ma grande. « Vraiment ? voulut savoir la fille sans la moindre conviction. » Elle avisa Bobby du coin de l’œil, tandis qu'il s'affairait à vider son verre de vin d'un seul trait : pas la moindre saveur pour cinquante euros vidés en quatre gorgées. « J'ai eu du mal à renoncer à mes cours d’Économie, conclut-il à la croisée des chemins. Je n'étais pas fait pour ça, faut croire. » Cela suffirait en répartie et pour l'une et pour l'autre. « Mais j'étais bien là, reprit-il. C'est juste que je me mettais toujours dans un coin (il souriait maintenant), vous savez, là où on n'entend pas très bien les profs qui commencent à être sourds et croient qu'ils crient quand ils murmurent... » Les lèvres de Camille frémirent en même temps qu'elle grognait. « Okay... maintenant, c'est vraiment bizarre. » Bobby demeurait désormais stoïque, le regard vissé à celui de Nathalie. « Qu'est-ce vous avez tous les deux ? » Pas davantage de réponse. « Maman ! réprouva Camille. Qu'est-ce que tu lui as encore dit ?! » C'est vrai, ça, Nathalie... Qu'est-ce que tu m'as encore dit de méchant et, enfin, de vrai ? « Laisse, Camille, dit-il tout de même avant son affreux stoïcisme, ça n'a pas d'importance. Ta mère n'arrive pas à décider si elle m'aime ou si elle me déteste... C'est tout. » Bobby préservait donc son silence. Il n'y avait plus qu'à contempler son œuvre. Sa délicieuse petite-amie le regarda une dernière fois, désemparée, avant de reprendre ses assauts en direction de l'autre bout de la table : « Tu ne peux pas t'en empêcher, bien sûr ? Pourquoi tu ne veux pas comprendre que Bobby m'aime et qu'il ne veut que mon bien ? Tu pourrais faire un effort pour le comprendre ! Me comprendre ! » Adolescente névrosée et complètement à côté de la plaque, Acte I : la cruauté de son indifférence pour elle n'effleura pas une seule seconde la conscience de Bobby.
Revenir en haut Aller en bas

Nathalie Tureau
Nathalie Tureau

MESSAGE : 14

« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  EmptyMar 2 Juil - 11:19


« J'ai eu du mal à renoncer à mes cours d’Économie. Je n'étais pas fait pour ça, faut croire. » « Crois-bien que je le déplore... » lâcha son adversaire, amère, les yeux dans le vague. L'étrangeté de la situation n'échappa guère plus longtemps à la tierce personne, conviée malgré elle à une plaisanterie de mauvais goût. Et fort de son aplomb insupportable, l'ange Bobby parvint une nouvelle fois à la retourner contre elle. « Ta mère n'arrive pas à décider si elle m'aime ou si elle me déteste... » « Au contraire, c'est tout vu. » parvint-elle à glisser avant de subir les foudres de sa fille, peu encline, elle, aux sous-entendus. Mon dieu... soupira t-elle intérieurement, tandis que Camille, malgré elle, débitait ineptie sur ineptie. Il m'aime... Il ne veut que mon bien... Car c'était bien là, le drame. Elle était amoureuse. D'un odieux connard. Et Nathalie ne voyait rien qui ne puisse la sauver du naufrage.

« Vivre en bonne intelligence avec son ado » aurait probablement conseillé, dans une pareille situation, de faire preuve d'honnêteté et de construire, ensemble, un espace de discussion propre à révéler les émotions de chacun et... Conneries. On n'annonçait pas à sa fille de dix-huit ans que son premier amour s'était probablement branlé sur internet une demi-douzaine de fois en discutant avec sa mère... Même sans le savoir. L'honnêteté n'avait pas sa place ici. Du moins pas tout de suite. Pas comme ça. Même s'il la poussait à bout. « Je te comprends Camille... » tenta t-elle, avec déjà trop de lassitude dans la voix. « C'est ça. » répliqua aussitôt la fille. « Je ne voulais pas que ça se passe comme ça, mais il faut croire qu'avec toi... Je suis désolée... » ajouta t-elle plus doucement à l'adresse de Bobby, tandis que la quadra rongeait son frein, partagée entre l'envie de le scalper et de lui tailler un vrai beau sourire au couteau. « Dorénavant on fera l'impasse sur les dîners à la maison. » déclara solennellement Camille, comme si elles avaient échangé les rôles. Et pour cause, depuis plusieurs heures, Nathalie ne se sentait plus la force de relever ses insolences. Peut-être aussi parce qu'elle les méritait un peu. « Ca, c'est une idée. » approuva t-elle même, en levant son verre.
Revenir en haut Aller en bas


Contenu sponsorisé


« Mother I'd Like to Fuck. »  Empty
MessageSujet: Re: « Mother I'd Like to Fuck. »    « Mother I'd Like to Fuck. »  Empty

Revenir en haut Aller en bas
 

« Mother I'd Like to Fuck. »

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
DANDY LUDIQUE :: 
LE MARAIS
-